Une nouvelle stratégie thérapeutique

Au niveau cellulaire, les réponses immunitaires et inflammatoires sont régulées par des cascades de réactions chimiques qui modifient l'activité des protéines intracellulaires et conduisent à la production d'hormones pro- ou anti-inflammatoires (appelées cytokines). Dans le cadre des Maladies inflammatoires Chroniques Intestinales (MICI), les thérapies à base d'anticorps monoclonaux (Remicade®, Humira®) ciblent notamment directement l'une de ces cytokines pro-inflammatoire (le TNF; Tumor Necrosis Factor) afin de l'inactiver.

Toujours dans le but de réguler l'effet de ces cytokines, une autre stratégie thérapeutique consiste à intervenir plus amont en inhibant les cascades d'événements intracellulaires qui conduisent à leur synthèse. Cette stratégie est à la base des essais utilisant des inhibiteurs d'une protéine appelée p38. Cette protéine est directement impliquée dans la régulation de la production des cytokines pro-inflammatoires ainsi que dans l'adressage de certaines cellules immunitaires (lymphocytes) dans la muqueuse intestinale au cours des MICI. p38 appartient à une famille de protéine nommée MAPkinase dont le ciblage est également envisagé au cours d'autres pathologies chroniques inflammatoires.

Cependant cette stratégie se heurte actuellement au manque de spécificité des inhibiteurs utilisés, générant de nombreux effets secondaires et interdisant leur utilisation dans l'arsenal thérapeutique. Il apparaît également que cette protéine ne joue pas le même rôle en fonction du tissu où elle se trouve, expliquant que son ciblage produise des effets contradictoires dans les différents essais cliniques au cours des MICI. C'est en tout cas ce que suggère un article récemment publié dans le journal Gastroenterology qui démontre que la protéine p38 possède un rôle pro-inflammatoire dans certaines cellules de l'immunité (les macrophages) ainsi qu'un rôle important dans le maintien de la barrière intestinale dans les cellules épithéliales intestinales.

Il en résulte donc que l'inhibition de cette protéine diminue bien l'inflammation des cellules immunitaires mais conduit également à la diminution de la barrière intestinale, événement pouvant être impliqué dans le développement des MICI. L'identification de ce mécanisme permettrait donc d'anticiper cet effet secondaire par l'utilisation de molécules (dibenzazepine) permettant de rétablir la barrière intestinale dans le cadre d'une stratégie thérapeutique utilisant les inhibiteurs de p38. Les résultats publiés dans cet article montrent que cette association de molécules est  efficace pour réguler l'inflammation intestinale dans des modèles expérimentaux de colites induites chez la souris. Cette stratégie pourrait être envisagé afin d'améliorer les résultats des essais cliniques des inhibiteurs p38 chez l'homme.

 

Distinct Effects of p38a Deletion in Myeloid Lineage and Gut Epithelia in Mouse Models of Inflammatory Bowel Disease, MOTOYUKI OTSUKA, YOUNG JUN KANG, JIANLIN REN, HUIPING JIANG, YINBIN WANG, MASAO OMATA and JIAHUAI HAN*, Gastroenterology, in press, 2010