La phase préclinique de la maladie Crohn : une piste vers la prévention ?

À l'heure actuelle, toutes les interventions thérapeutiques dans le Crohn visent une maladie bien établie et même les molécules les plus puissantes ne sont pas en mesure de prévenir ou d’annuler les dommages chroniques souvent présents au moment du diagnostic. Afin de modifier véritablement l'histoire naturelle et les conséquences à long terme de la maladie de Crohn, une intervention efficace devrait idéalement se produire à une phase antérieure, en ciblant les processus biologiques primaires qui conduisent les maladies d'un stade préclinique à un stade clinique.

La reconnaissance récente des MICI (Maladies Inflammatoires Chroniques Intestinales) comme maladie évolutive a conduit à une réorientation du focus des stratégies thérapeutiques. De nos jours, il est largement accepté que le traitement efficace aux premiers stades de la maladie, avant que les atteintes intestinales ne se produisent, est susceptible de produire de meilleurs résultats, entraînant des taux réduits d’hospitalisation et de chirurgie. Malgré les efforts déjà en cours qui visent à modifier les modèles thérapeutiques, l’association d'un diagnostic précoce avec les meilleurs traitements disponibles et efficaces, la rémission sans médicament ou l’absence de progression de dommages sur la paroie intestinale restent un défi chez un nombre significatif de patients.

Une fois le diagnostic MICI déterminé, l’intestin est déjà endommagé chez beaucoup de malades. Dérèglement de la réponse immunitaire, dysbiose et lésions tissulaires liées à l’atteinte de la maladie, dans la plupart des cas, sont alors  irréversibles. A ce jour, toutes interventions thérapeutiques dans les MICI visent la maladie à un stade bien établi, et même les agents le plus puissants ne sont pas en mesure de prévenir ou de renverser la progression chronique souvent présente au moment du diagnostic.

Afin de vraiment changer l'histoire naturelle des MICI et ses conséquences à long terme, l’idéal serait d’avoir une intervention efficace à proposer à une phase plus précoce. Cette intervention aurait comme cible les processus biologiques primaires qui conduisent la maladie d'un stade préclinique à un stade clinique. De plus en plus de preuves montrent que pendant la progression des MICI, comme dans d’autres maladies auto-immunes, il existe une période caractérisée par des changements immunologiques qui précèdent les symptômes et peut-être même les lésions d’organe qui s’installent pendant les années précédant le diagnostic.

Des travaux sont en cours sur ce concept de maladie préclinique en s’appuyant sur des études préliminaires réalisée sur les MICI et sur des preuves complémentaires examinées dans d’autres maladies auto-immunes.

Référence

Pr, Jean-Frédéric Colombel
Ecole de Médecine Icahn à Mount Sinai, New York, NY