La RCH débute chez les jeunes adultes entre 20 et 40 ans. Avec près de 3000 nouveaux cas par an, et environ 110 000 malades, la France est moins touchée que ses voisins européens.
La médecine permet d'agir sur les symptômes, mais reste impuissante à déterminer l'origine de la maladie et à la guérir définitivement.
Définition
La rectocolite hémorragique fait partie des Maladies Inflammatoires Chroniques de l'Intestin (MICI). Elle se caractérise par des lésions continues le plus souvent superficielles qui débutent dans le rectum et peuvent s'étendre sur l'ensemble du colon sans jamais atteindre d'autres segments du tube digestif.
Elle évolue par poussées entrecoupées de périodes de rémissions (périodes calmes sans symptômes). Elle peut s'accompagner de manifestations extra intestinales (articulaires, cutanées, hépatiques...).
Epidémiologie
Elle est très fréquente dans les pays industrialisés : Europe du Nord-Ouest et Etats-Unis. Avec près de 3000 nouveaux cas par an, la France est moins touchée. La maladie se déclare en majorité entre 30 et 40 ans.
Le tabac diminue le risque de RCH à l'inverse de la Maladie de Crohn.
L'appendicectomie (dans l'enfance) a également un rôle protecteur.
Symptômes : douleur et gravité
Le symptôme le plus fréquemment rencontré au cours de la RCH est la présence de sang dans les selles (rectorragies). Ceci peut être accompagné d'émission de glaires, de diarrhées, de douleurs abdominales...Les poussées sévères de la maladie peuvent déboucher sur une perte de poids, une fatigue importante et de la fièvre.
Dans près d'1/3 des cas la maladie débute avec des lésions limitées uniquement sur le rectum, 1/3 des malades vont avoir une atteinte d'emblée maximale sur tout le colon (pancolite). Après 20 ans d'évolution, cette atteinte pancolique est retrouvée chez 50% des malades.
Des manifestations extra-intestinales peuvent apparaître : articulations (arthralgies, lombalgies), peau (érythème noueux) ou encore au niveau des yeux et du foie.
Chez les enfants, la rectocolite hémorragique induit des phénomènes de malnutrition, qui peuvent provoquer des retards de croissance staturo-pondérale importants.
Un certain nombre de complications non rares et parfois inaugurales alourdissent la prise en charge médico-chirurgicale de ces malades : colite aigue grave, dégénérescence cancéreuse dont le risque est 18 fois supérieur à celui de la population générale après 20 ans d'évolution d'une forme pancolite.
Les MICI, une énigme scientifique...
L'inflammation chronique du tube digestif qui caractérise les MICI semble être la conséquence d'une anomalie de la réponse immunitaire de l'intestin vis-à-vis de composants de la flore intestinale chez des sujets génétiquement prédisposés, sous l'influence de facteurs environnementaux.
Une susceptibilité génétique
Cette susceptibilité a été suggérée depuis de nombreuses années devant la présence d'un nombre élevé de malades dans certaines ethnies, devant des associations rares avec des maladies génétiques et surtout par l'observation de cas familiaux (où la similitude dans la présentation de la maladie est souvent de règle) et la concordance pour ces maladies dans les couples de jumeaux.
Depuis 2001, où le premier gêne de susceptibilité à la maladie a été identifié (NOD2/CARD15 sur le chromosome 16), près d'une centaine d'autres gènes ont été mis en évidence. En tenant compte de la fréquence de ces maladies, le risque absolu pour des parents du 1er degré (père, mère, frère-sœur, enfant) de contracter la maladie est de l'ordre de 1% (versus 0,1% dans la population générale) montant jusqu'à 6% si plusieurs membres de la fratrie sont atteints. Néanmoins, il n'y a à ce jour aucune indication à effectuer une enquête génétique.
Le rôle de ces gènes à risque, leurs interactions et les conséquences de leurs mutations font l'objet d'intenses recherches mais leur poids dans la physiopathologie des MICI reste modeste et jamais les MICI ne sont des maladies héréditaires.
Une dysrégulation du système immunitaire
Celle-ci est caractérisée par des anomalies de la réponse immunitaire innée et de la réponse immunitaire spécifique : La réponse immunitaire innée est la première ligne de défense non spécifique et immédiate de l'organisme. Toute une cascade de mécanismes entre en jeu associant une augmentation de la perméabilité de l'intestin notamment vis-à-vis des bactéries présentes dans le tube digestif qui sont alors capables d'induire une inflammation et d'attirer des cellules immunitaires dans la paroi intestinale.
Ces cellules immunitaires spécialisées induiront une réponse spécifique contre des composants de la propre flore intestinale du malade, à l'origine d'un entretien de l'inflammation de l'intestin grêle ou du colon.
Le rôle de l'environnement
Les variations de l'incidence (nombre de nouveaux cas par an) et de la prévalence (nombre de malades) des MICI dans le temps et dans l'espace suggèrent un rôle majeur de l'environnement. Les MICI sont avant tout des maladies environnementales. L'épidémiologie montre une incidence plus élevée dans les pays industrialisés et un accroissement de celle-ci dans les pays en voie d'occidentalisation. Ceci peut laisser supposer que certains facteurs environnementaux, probablement liés au mode de vie occidental, pourraient avoir une influence importante sur l'apparition de cette maladie.
L'étude des populations migrantes est très intéressante et a clairement permis de montrer que certaines populations ont vu leur chiffre d'incidence initialement bas, rejoindre rapidement celui de leur pays d'accueil, illustrant l'importance du mode de vie dans la survenue de ces maladies.
De très nombreux facteurs de risque ont été évoqués. Les seuls clairement établis à ce jour, sont le tabac (par des mécanismes encore inconnus à ce jour, non liés à la nicotine) qui protège de la RCH mais favorise et aggrave la maladie de Crohn, et l'appendicectomie (dans l'enfance) qui protège de la rectocolite.
L'influence de la flore intestinale
Il semble actuellement bien établi que la flore intestinale ou microbiote joue un rôle clé au cours des MICI.
Différentes observations illustrent ce fait :
- chez les malades atteints de MICI, différentes populations bactériennes sont modifiées (dysbiose). Des bactéries potentiellement pathogènes (telles que Escherichia coli, Listeria monocytogenes, Yersinia enterocolitica et Mycobacterium paratuberculosis) sont trouvées en excès tandis que la concentration de bactéries bénéfiques du groupe des Firmicutes est diminuée à la fois en espèces et en proportion.
- Les localisations les plus fréquentes des MICI coïncident avec les zones où se trouvent la plus haute densité de bactéries dans le tube digestif (iléon terminal et côlon).
- Chez les malades pour lesquels une intervention chirurgicale s'était avérée nécessaire, le risque de récidive précoce est d'autant plus important que le taux d'une certaine bactérie (Faecalibacterium. prausnitzii) est bas.
- Dans les modèles animaux de MICI, l'administration de cette bactérie ou des molécules qu'elle sécrète réduit l'inflammation intestinale et améliore nettement la survie.
- De même, une maladie inflammatoire intestinale ne se développe pas si les animaux sont maintenus en milieu stérile dès la naissance.
Toutes ces observations ouvrent la voie à de nouvelles perspectives de recherche, la mise en place de nouveaux outils diagnostics et de nouveaux espoirs thérapeutiques et préventifs.
Les traitements de la rectocolite hémorragique
Les traitements actuels ont pour premiers objectifs le contrôle des poussées, la prévention des rechutes et le maintien d'une qualité de vie optimale pour chaque malade.
Les dérivés aminosalicylés sont très utilisés et leur efficacité a été prouvée dans le cas de poussées légères ou modérées. Leur emploi en traitement d'entretien permet de maintenir les rémissions. Ces agents réduisent aussi le risque de survenue d'un cancer colo-rectal. Les suppositoires et lavements aminosalicylés sont plus efficaces que les corticoïdes administrés par voie rectale.
Les corticoïdes constituent le traitement de base des poussées d'intensité moyenne ou sévères. Ils sont utilisés sur de courtes pèriodes, afin de limiter les effets secondaires.
Les immunosuppresseurs se sont largement développés. Ils agissent de manière très ciblée sur certains composants du système immunitaire : l'AZATHIOPRINE, le 6-MERCATOPURINE et le METHOTREXATE sont les plus souvent prescrits. Leur délai d'action étant de quelques mois, il ne peuvent être utilisés seuls pour le traitement des poussées. Ils sont indiqués pour les formes évolutives ou de traitement difficile. La cyclosporine est aussi utilisée dans les formes sévères résistantes aux corticoïdes, sur une courte pèriode.
Les antidiarrhéiques ralentissent la traversée des aliments dans l'intestin.
Les antispasmodiques combattent les douleurs abdominales. Leur action contre les spasmes peut s'exercer au niveau des fibres nerveuses, des fibres musculaires, ou des deux.
Outre la nécessité d'une alimentation adaptée, un traitement nutritionnel peut s'avérer nécessaire. Cette assistance nutritionnelle peut être entérale (par sonde nasogastrique) ou parentérale (par voie veineuse). Elle n'est cependant envisagée qu'en cas de dénutrition importante ou de retard staturo-pondéral chez l'enfant ou l'adolescent. Elle n'a pas d'effet sur le cours évolutif de la maladie, contrairement à la maladie de Crohn.
Les biothérapies, les anti-TNF :
- L’INFLEXIMAB (Remicade) agit en inhibant une protéine produite en excès au cours de la maladie de Crohn, le TNFα. Le TNFα est produit par les cellules de l’organisme et favorise l’inflammation, en participant à la lutte contre certaines infections. L’infliximab est un anticorps monoclonal, c'est-à-dire une molécule très ciblée, produite grâce à la biotechnologie pour neutraliser de façon spécifique le TNFα. On utilise pour sa synthèse des cellules isolées d’origine humaine (elles assurent la fabrication d’environ 75% de la molécule) et provenant de souris (25%), ce qui aboutit à un anticorps dit «chimérique». Lorsque l’on effectue une perfusion d’infliximab, il reste présent dans l’organisme pendant 2 à 3 mois, avant d’être détruit.
- L’ADALIMUMAB (Humira) agit également en inhibant une protéine produite en excès au cours de la maladie de Crohn, le TNFα. Lui aussi est un anticorps monoclonal. On utilise pour sa synthèse des cellules isolées d’origine humaine et cet anticorps est humanisé à 100%. Lorsque l’on effectue une injection d’adalimumab, celui-ci reste présent dans l’organisme pendant 2 à 3 mois avant d’être détruit.
- Le GOLIMUMAB (Simponi) agit en inhibant une protéine produite en excès au cours des maladies inflammatoires intestinales, le TNFα. Le TNFα est produit par les cellules de l’organisme et favorise l’inflammation, en participant à la lutte contre certaines infections. Le golimumab est un anticorps monoclonal, c'est-à-dire une molécule très ciblée, produite grâce à la biotechnologie pour neutraliser de façon spécifique le TNFα. On utilise pour sa synthèse des cellules isolées d’origine humaine et cet anticorps est humanisé à 100%. Lorsque l’on effectue une injection de golimumab, celui-ci reste présent dans l’organisme pendant 2 à 3 mois avant d’être détruit.
Les biosimilaires : En 2015, le brevet de l’INFLIXIMAB (Rémicade®) est tombé dans le domaine public ce qui a conduit à l’arrivée de biosimilaires de cette molécule, également dénommés « infliximab ».. L'ADALIMUMAB a dorénavant plusieurs biosimilaires également. Un médicament biosimilaire est similaire à un médicament biologique de référence qui a été autorisé en Europe depuis plus de 8 ans et dont le brevet est tombé dans le domaine public.
Les médicaments biologiques ou biomédicaments, sont obtenus par un procédé biotechnologique qui implique une source biologique (protéines, cellules…). Un médicament biosimilaire n'est pas un médicament générique.
L’intégrine α4-β7 : Le VEDOLIZUMAB ou Entyvio agit en bloquant l’intégrine α4-β7 qui est une molécule-clé permettant l’acheminement de cellules de l’immunité - les lymphocytes - au niveau du tube digestif au cours de la maladie de Crohn et de la rectocolite hémorragique. En condition normale, l’intégrine α4-β7 permet aux lymphocytes d’être dirigés spécifiquement vers l’intestin, afin de participer aux défenses naturelles de l’organisme. Au cours de la maladie de Crohn et de la rectocolite hémorragique, le recrutement de ces cellules est anormalement élevé ce qui amplifie et perpétue l’inflammation intestinale. Le mécanisme d’action du vedolizumab est donc tout à fait différent des anticorps anti-TNFα. Le vedolizumab est un anticorps monoclonal de type IgG1, c'est-à-dire une molécule très ciblée pour neutraliser de façon spécifique l’intégrine α4-β7 humaine. Cet anticorps produit grâce à la biotechnologie est humanisé à 100 %. Lorsque l’on effectue une injection de vedolizumab, celui-ci reste présent dans l’organisme pendant 3 à 4 mois avant d’être éliminé.
Le traitement chirurgical est indiqué dans les formes sévères, après échec du traitement médical, dans les formes chroniques invalidantes et dans les complications graves aiguës (hémorragie, perforation, mégacolon toxique). La chirurgie permet de guérir définitivement la maladie.
10 à 15 % des patients subissent une opération chirurgicale dans les 10 premières années d'évolution de la maladie.
Les techniques chirurgicales s'appuient sur une colectomie totale, c'est à dire l'exérèse de la totalité du côlon. Deux options sont possibles :
- Anastomose iléo-anale : Exérèse du rectum et confection avec l'intestin grêle d'un réservoir pour le remplacer. Dans quelques cas rares, on observe une inflammation du réservoir appelée pochite qui peut être traitée par antibiotiques.
- Anastomose iléo-rectale, conservation du rectum dans le cas où il est peu atteint et la maladie récente. Cette opération offre un meilleur confort post-chirurgical mais peut se compliquer d'une rechute de la maladie sur le rectum.
Les protocoles thérapeutiques : une chance pour les malades ! Malgré les progrès considérables de ces dernières années, de nombreux malades « échappent » à leur traitement. Ces protocoles ont pour but de tester de nouvelles alternatives thérapeutiques mais aussi d'optimiser des schémas de prises en charge.